Sadeghi S. & Dumont H.J. 2014

De Odonates du Monde
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Deliry C. 2025 – Sadeghi S. & Dumont H.J. 2014. - In : Odonates du Monde (Histoires Naturelles) [2004-2025] – Version 15643 du 29.07.2023. – odonates.net

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Sadeghi S. & Dumont H.J. 2014 - Variation in the shape of the wings and taxonomy of Eurasian populations of the Calopteryx splendens complex (Odonata: Calopterygidae). - European Journal of Entomology, 111 (4) : 575‑583. - [A traiter !] : résumé et commentaires (lien propre ici)


Résumé (Traduction libre)

Nous avons utilisé la morphométrie géométrique pour déterminer la variation de la morphologie des ailes antérieures des individus de 20 populations de Calopteryx splendens s.l. en Eurasie et nous les avons mises en relation avec la taxonomie circonscrite de ce taxon. Nous avons trouvé des différences de forme, avec la plus grande et la plus petite taille centroïde des ailes chez les populations adjacentes du nord (orientalis) et de l'ouest (intermedia) en Iran, respectivement. L'isolement et la relation ne sont donc pas nécessairement déterminés par la distance, mais souvent associés au bassin fluvial habité. La variation de la forme des ailes, cependant, était beaucoup plus importante. Les populations situées à la limite orientale de l'aire de répartition (Tadjikistan, Kirghizistan et Kazakhstan oriental) sont particulièrement différentes. Curieusement, aucun nom taxonomique ne leur est associé, bien qu'ils soient peut-être parmi les plus anciens représentants du complexe des splendens. Les populations européennes et asiatiques se trouvent dans deux clades distinctes. L'un comprend les insectes qui n'ont pas de tache alaire ou qui en ont une de taille moyenne, qui n'atteint pas l'extrémité de l'aile (groupe waterstoni), tandis que l'autre comprend les insectes qui ont des taches alaires très larges ou, lorsqu'elles sont courtes, elles s'étendent jusqu'à l'extrémité des ailes et la plupart des ♀ sont androchromes (groupe ancilla ou intermedia). Le Turkménistan et la population du nord de l'Iran forment une lignée distincte à l'intérieur de ce clade, que nous assimilons au Calopteryx orientalis. Les populations du sud de l'Albanie et de la Grèce forment une branche distincte correspondant à ssp. balcanica ; deux populations d'Irlande et d'Italie forment une branche qui n'a pas d'équivalent dans la taxonomie traditionnelle, tandis que Calopteryx xanthostoma n'a pas été identifié par la forme de ses ailes. Comprendre cette multitude de phénotypes et l'énorme quantité de variations au sein de certaines populations mais pas dans d'autres devient facile si l'on suppose qu'il y a eu deux vagues probables de migration au Pléistocène tardif, la première d'insectes dépourvus de taches qui ont migré vers l'est et l'ouest à partir du bassin sud de la mer Noire, la seconde, peut-être à partir de l'ouest de la Caspienne, composée d'insectes fortement tachetés avec des femelles androchromes. L'hybridation entre ces deux vagues a donné lieu à la pléthore actuelle de formes colorées et explique pourquoi des phénotypes similaires peuvent apparaître indépendamment dans des endroits très éloignés.

Abstract

[See links above]
We used geometric morphometrics to determine variation in the morphology of the forewings of individuals in 20 populations of Calopteryx splendens s.l. in Eurasia and related these to the circum-specific taxonomy of this taxon. We found differences in shape, with the largest and smallest centroid size of the wings in adjacent northern (orientalis) and western (intermedia) populations in Iran, respectively, so isolation and relationship are not necessarily determined by distance, but often associated with the stream basin inhabited. The variation in wing shape, however, was much greater. with Populations at the eastern edge of the range (Tajikistan, Kyrgyzstan and East Kazakhstan) uniquely different. Oddly, no taxonomic name is associated with them, although they may be among the oldest representatives of the splendens complex. The European and Asian populations are in two separate clades. One of these includes insects with no to a medium-sized wing spot, which does not reach the tip of the wing (waterstoni-group), while the other includes insects with very broad wing spots, or, when short, it extends to the very tip of the wings and most females are androchrome (ancilla or intermedia group). Turkmenistan and northern Iranian population form a separate line inside this clade, which we equate with Calopteryx orientalis. South Albanian and Greek populations are in a separate branch corresponding to ssp. balcanica; two populations from Ireland and Italy form a branch that has no equivalent in traditional taxonomy, while Calopteryx xanthostoma was not identified by its wing shape. Understanding this multitude of phenotypes and the enormous amount of variation within certain populations but not in others becomes easy if one assumes there were two probable late Pleistocene waves of migration, the first of insects lacking spots that migrated east and westwards from the South Black Sea basin, the second, perhaps from the west Caspian, composed of heavily spotted insects with androchromic females. The hybridization between these two waves resulted in the current plethora of colour forms and accounts for why similar phenotypes may turn up independently in widely distant locations.

Commentaires et discussion

Cet article est précédé par le document suivant :
Sadeghi S., Adriaens D. & Dumont H.J. 2009 - Géométric morphometric analysis of wing shape variation in ten european populations of Calopteryx splendens (Harris, 1782) (Zygoptera: Calopterygidae). - Odonatologica, 38 (4) : 341-357. - [A traiter !] : résumé et commentaires (lien propre ici)


Sadeghi & Dumont (2014) ont examiné 580 ♂ provenant de l'essentiel de l'aire de Calopteryx splendens s.l., provenant de 20 localités dont 12 en Asie et 8 en Europe.

Je confronte ma proposition de splitage de Calopteryx splendens s.l. (Calopteryx splendens s.str., Calopteryx ancilla, Calopteryx taurica) aux éléments de l'article de Sadeghi & Dumont (2014), notamment sur le document repris de cet ouvrage et annoté par nos soins.

🔍 - Fig.1 - Extrait de Sadeghi & Dumont (2014) - Annotations : ©© byncsa - Cyrille Deliry - Histoires Naturelles

J'attribue relativement facilement l'essentielle des populations illustrées par Sadeghi & Dumont (2014) à l'une où l'autre des espèces issues du splitage. Une analyse plus fine s'avère néanmoins nécessaire pour les populations orientales marquées [1] et [2]. On trouve en [1] des individus qui correspondent en définitive à Calopteryx orientalis. Je n'ai pas su les identifier dans un premier temps. Le cas [2] est en écho avec la présence jusqu'en Sibérie centrale au moins de phénotypes qui ressemblent à splendens s.str. par une bordure côté base arrondie et la présence d'un apex hyalin (néanmoins qui semble relativement réduit). Ceci correspond donc à des cas signalés en Sibérie centrale, et ici au Kazakstan, Ouzbekistan et Tadjikistan. Le hyatus géographique entre ces populations et les authentiques Calopteryx splendens s.str. est en faveur d'un nouveau taxon, alors oriental dont le phénotype est similaire à celui de splendens s.str.
Sadeghi & Dumont (2014) présentent l'extension de la coloration alaire des ♂ et font une analyse précise de la forme ou des proportions des ailes.

Dans leur article les auteurs essaient de concilier leurs résultats sur la géométrie des ailes avec la taxonomie classique et les phylogénies basées sur l'ADN. Une des premiers conclusion est que la dimension des ailes ne peut être utilisée pour réaliser des désignations taxonomique tant elle peut varier, y compris dans un même secteur.
Il est question de trois branches séparées dans le phénogramme qui met en outre en évidence un clade basal composées de populations marginales se trouvant en Asie centrale similaires, mais séparées de près de 5000 km, aux populations d'Europe occidentale (cf. splendens s.str. selon nos désignations) et ayant des points communs avec celles décrites d'Afghanistan par Schmidt (1961). Elles présentent une marque alaire large avec un apex clairement hyalin. Celles-ci se rapprochent sur ce point des splendens s.str. occidentaux selon moi par la forme arrondie de la bordure basale de la tache des ♂ et les distingue de l'ensemble que je propose pour ancilla dont cette bordure est en pointe dirigée vers la base. Il s'agit d'un ensemble inédit que j'ai mis plus haut en évidence sous le cas [2]. Les marques alaires de ce nouvel ensemble pourrait peut-être plus justement considéré comme associé à ce que j'ai placé sous ancilla intermedia, avec simplement un apex hyalin. Cette dernière hypothèse ajoute à l'idée de séparer intermedia des autres taxons et en conséquence d'y rattacher les populations du cas [2]. Pour résoudre cette hypothèse des analyses génétiques s'imposent et des informations sur les ♀ afin de savoir si elles sont homéochromes comme chez intermedia ou non, sont à rassembler.
Sadeghi & Dumont (2014) distinguent un cluster europaeo-pontique caractérisé par des ♂ dont la tache alaire est très variable depuis son absence totale (cf. waterstoni) à son extension notable (cf. xanthostoma). Ils découvrent toutes les transitions entre les deux (taurica, tchaldirica, erevanense, mingrelica, amasina). Des hypothèses de populations originelles et migrations au cours des temps anciens sont données, mais elles ne me semblent pas convaincantes et les auteurs montrent surtout qu'ils n'ont pas su ordonner ce système en le qualifiant de complexe et variable (C.Deliry, com. avril 2020) ; ils seront néanmoins plus clair dans la suite de leur article sur ce fait. Ils soulignent en outre que la forme des ailes ne permet pas de résoudre le cas de Calopteryx xanthostoma, mais il convient de souligner que le seul échantillon considéré provient d'Espagne et j'ai vu à la lecture de Sadeghi & al. (2009) que si les populations espagnoles présentaient des ailes relativement larges, ce n'est pas le cas des populations françaises que nous connaissons pour lesquelles a contrario j'attribue des ailes particulièrement effilées. J'en rappelle la figure ci-dessous.

🔍 - Fig.2 - ©© byncsa - Cyrille Deliry - Histoires Naturelles
Adéquation des morphologies alaires selon Sadeghi & al. (2009) avec nos hypothèses de taxons principaux (voir notes ci-dessus) - Représentations schématiques

Les deux auteurs distingue un troisième ensemble à répartition très vaste depuis le sud de l'Anatolie, à l'Asie occidentale et atteignant la Chine (Xinjiang) et la Mongolie. Celui-ci est associé à ancilla qui est le plus anciens nom lui étant applicable, le rapprochant aussi d'intermedia. Ils soulignent la présence significative de ♀ androchromes dans cet ensemble.

Sadeghi & Dumont (op.cit.) considèrent que c'est ce qui s'est passé après le Pléistocène qui a façonné trois groupes. Ils envisagent qu'un Insecte apparenté, sinon identique au Calopteryx waterstoni ait colonisée la plus grande partie de l'Europe et de l'Asie. Une vague ultérieur d'Insectes de type ancilla produit une pléthore de phénotypes qui ont été décrit par les taxonomistes morphologiques sous divers noms. Ce sont selon ces auteurs tous des hybrides dont Calopteryx splendens splendens est un exemple. Dumont & al. (1993) révèlent d'ailleurs à son sujet, l'existence d'un cline concernant ce taxon.
Il est intéressant de souligner l'hypothèse donnée que pour une raison quelconque les nombreuses populations hybridées perdent leurs ♀ androchrome où comme dans le cas de Calopteryx splendens faivrei de Poitou-Charentes (recte hic) ou de Calopteryx splendens caprai en Italie continentale, les ♀ androchromes sont devenues rares. Dans les populations "pures" telles celles qui sont isolées en quelques points de Turquie ou en Syrie, toutes les ♀ sont androchromes. Sadeghi & Dumont (2014) parlent souvent pour les différents ensembles de deux vagues, mais leurs explications ne sont pas vraiment claires à ce sujet. Il y a dans la suite des explications une confusion entre phénotypes locaux convergeant avec des phénotypes parfois situé à très grande distance et valeurs taxonomiques. Par exemple les populations d'Irlande et du Jutland qui ne sont selon moi que des Calopteryx splendens s.str. à marques alaires très réduites sont présentés comme des types taurica ou waterstoni. De tels phénotypes découverts très loin à l'est dans le Bassin versant de la Léna en Yakoutie, ont été nommés Calopteryx splendens njuja. En fait le phénotype taurica est présent dans la plupart des cas sur les stations les plus distantes du foyer d'origine situé en Anatolie.


Sadeghi S., Adriaens D. & Dumont H.J. 2009 - Géométric morphometric analysis of wing shape variation in ten european populations of Calopteryx splendens (Harris, 1782) (Zygoptera: Calopterygidae). - Odonatologica, 38 (4) : 341-357. - [A traiter !] : résumé et commentaires (lien propre ici)